Pourquoi avoir écrit cet ouvrage ?

Cet ouvrage part de plusieurs constats : des légendes urbaines courent autour de l’école, le courant anti-pédagogique conteste notamment le fait qu’à l’école les élèves apprennent toujours et que les enseignants sont efficaces.

L’école française est imparfaite, mais pas non plus décadente. Le tableau n’est pas aussi noir que celui dressé par certains !

Cet ouvrage s’appuie sur des dizaines de milliers de réponses à des questionnaires, proposés aux élèves et aux personnels, sur des centaines d’heures d’observation et d’action dans des lieux souvent difficiles.

Le « c’était mieux avant » regrette une école profondément inégalitaire, qui n’était pas confrontée au chômage de masse, aux changements des modèles familiaux, et encore moins à la révolution Internet.

Malgré des difficultés et des imperfections, l’école s’adapte à ces mutations profondes. Toutefois, ce que j’ai perçu sur le moral des personnels de l’éducation m’inquiète.

 

Quels chiffres faut-il retenir ?

90% des élèves déclarent qu’ils se sentent bien dans leur établissement. Il y a des nuances bien sûr, mais globalement cela fonctionne ! En revanche, pour les personnels de l’éducation le constat est extrêmement préoccupant.

Je travaille depuis des années avec l’Autonome de Solidarité Laïque. J’ai pu grâce à elle mener des études auprès des personnels de l’éducation, de la maternelle au lycée. Les résultats sont sans appel : non seulement les personnels n’ont pas le moral, mais ce phénomène s’est aggravé à l’école primaire comme dans les lycées et collèges. En 5 ans, de 2011 à 2016, le nombre de personnels se disant insatisfaits du climat de leur établissement a augmenté de près de 10% dans les premier et second degrés.

En 2011, dans les écoles primaires 25% des enseignants parlaient en effet d’un climat dégradé, contre 34% en 2016. Dans le second degré, 38% des personnels se disaient en 2012 insatisfaits du climat de leur établissement, ils sont 48% dans ce cas en 2016, soit près de la moitié !

Ce malaise ressenti par les personnels est considérable. Il impacte l’exercice du métier, mais aussi la satisfaction qu’il apporte.

 

Comment expliquer ce malaise des personnels ?

Les relations avec les élèves et leurs parents pèsent peu dans cette perte de sens. Le ras-le-bol des personnels est d’abord contre le « système » : médias, opinion publique et surtout l’institution Education nationale. Sa gouvernance est fortement remise en cause par les personnels de l’éducation, c’est-à-dire le fonctionnement hiérarchique pyramidal et la bureaucratie qui en découle.

Des injonctions perçues comme paradoxales sont aussi soulignées. D’excellentes réformes peuvent passer pour des réformes contre les personnels par manque de concertation, d’information et de formation. L’ajustement des pratiques n’est pas naturel et ne peut se faire simplement parce qu’une circulaire le demande, une loi l’encourage ou un éditorialiste sème le doute.

 

Vous évoquez une augmentation des conflits d’équipe, qu’en est-il ?

Ce ras-le-bol se traduit en effet par des conflits d’équipe en hausse. En 2016, 25,5 % des enseignants des collèges et lycées déclaraient avoir été mis à l’écart par leurs collègues et 41 % des enseignants pensaient que l’équipe des adultes n’était pas solidaire. Au niveau des écoles primaires tous les indicateurs ne sont pas « au rouge » avec par exemple un sentiment de meilleure solidarité d’équipe, mais les tensions sont aussi en augmentation.

 

Quels sont les leviers de changement pour l’école ?

A partir de ces constats, je détaille dans l’ouvrage plusieurs priorités pour l’école. Elles portent, selon moi, sur les enfants ayant des troubles du comportement, le travail en équipe, l’éducation prioritaire, mais aussi la gouvernance dans l’Education nationale. Il est aussi impératif de mettre en œuvre une véritable formation pour les personnels. Cette formation ne doit pas uniquement s’appuyer sur des connaissances disciplinaires, mais aussi sur des solides connaissances et compétences pédagogiques générales. Pourquoi, par exemple, des modules sur la dynamique de groupe sont-ils limités à quelques heures alors qu’un enseignant va côtoyer dans son métier des groupes pas forcément faciles à gérer ?

 

En quoi le partenariat avec l’ASL a-t-il été utile à vos recherches ?

L’ASL et sa Fédération (FAS) m’ont permis de mener des études de grande ampleur auprès des personnels de l’éducation. Les enseignements tirés de ces études n’engagent que moi, mais nous collaborons depuis plusieurs années sur le climat scolaire. Le climat scolaire ne se décrète pas, il se construit autour de solidarités collectives !

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