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Entretien avec une ergonome Sorties scolaires : comment mieux prévenir les risques ?Note2be : « un site qui aura un prix »

Apparu le 2 février dernier (2008), ce site permet aux écoliers, lycéens, collégiens et étudiants de noter leurs enseignants anonymement. Anonymement pour les élèves. Le principe de ce site appelé Note2be.com implique que les professeurs soient nommés, en plus de la mention de la matière enseignée et du nom de l’établissement. L’élève peut effectuer une recherche sur un nom propre, un nom de ville, un code postal, un établissement et, c’est l’intérêt, proposer un établissement et soumettre une notation.
L’intention de l’auteur du site est claire «Prends le pouvoir, note tes profs ». Il déclare même à l’AFP que son site répond à une démarche toute simple « un rêve d’écolier. Cela ne va pas chercher plus loin. Et c’est une démarche légitime car c’est quand même pour eux que le système éducatif est fait ».
Il convient de notre point de vue d’observer le site Note2be, sous deux angles : la forme et ses conséquences juridiques mais aussi le fonds et ses conséquences sur les relations dans l’école.
Juridiquement, mais la décision du juge des référés saisi par des organisations syndicales viendra le préciser dans les prochains jours, la forme du site est un indicateur. Note2be autorise la mise en ligne du patronyme d’un professeur, rattaché à son établissement d’exercice et la seule possibilité donnée à l’internaute est de faire figurer une note sur 20 sans autre commentaire.
Il convient effectivement de s’’interroger dès cet instant sur la légalité d’un service de ce type et l’avis du juge sera à suivre avec intérêt.
Si nous savons que la simple divulgation d’un nom patronymique ne constitue pas une atteinte à la vie privée, donc une violation de l’article 9 du Code civil, les quelques fiches individuelles que nous avons pu consulter comportent une case manifestement destinée à recevoir une éventuelle photographie de l’enseignant concerné.
Il va de soi que, dans ce cas de publication, une atteinte au droit à l’image serait caractérisée et permettrait une action immédiate pour obtenir la fermeture définitive du site et une réparation pour la personne visée.
La situation créée par le site est finalement assez paradoxale Le simple fait de rapprocher le nom patronymique d’un enseignant, son lieu d’exercice professionnel et des notes d’appréciation anonymes pourrait relever de la plaisanterie plutôt qu’une véritable entreprise d’évaluation des professeurs. Il suffit à ceux-ci ou à leur entourage d’aller enregistrer un certain nombre de notes positives pour ne jamais voir baisser les moyennes. L’anonymat des annotateurs et l’absence de tout commentaire rendent parfaitement ce site inintéressant. La meilleure protection contre celui-ci semble donc bien être…son manque total d’intérêt.
Cependant, avant sa disparition totale de la toile, le site, ne voulant pas perdre le bénéfice des contacts générés par le buzz médiatique ainsi créé, proposait aux internautes de laisser leur adresse e-mail pour « de plus amples » informations à venir. N’est ce pas là, la véritable intention de l’auteur ?
Mais malgré cela, le site, légitimement, doit inquiéter la communauté éducative. Les enseignants sont évalués sur 20 selon six critères : « intéressant », « clair », « disponible », « équitable », « respecté », « motivé ». L’auteur invite, au travers ces notations à « prendre le pouvoir sur les profs », il évoque un « rêve d’écolier » et précise que « tout cela est bien normal, puisque c’est bien pour les élèves qu’existe le système éducatif ».
Il y a là la démonstration d’une totale ignorance des nécessités du système éducatif. D’abord, celui-ci est organisé pour évaluer ses fonctionnaires. Cela nécessite critères et compétences. Le système éducatif est organisé autour de l’élève, certes, mais sur un mode relationnel qui nécessite le respect de l’un vis-à-vis de l’autre avec la reconnaissance de la place de chacun, l’enseignant et l’enseigné.
Nous savons que l’enseignant est de moins en moins considéré comme un représentant du service public d’éducation et de plus en plus comme un prestataire de service que l’on peut évaluer sans critère, et consommer sans modération. Tout cela aura un prix. Lorsque l’école ne sera plus le lieu de l’apprentissage du respect de l’autre, lorsque nous l’aurons livrée, sans résister, aux forces du consumérisme, il sera bien tard pour évoquer l’urgence de la protéger.
C’est pourquoi, la Fédération des Autonomes de Solidarité apporte son soutien juridique à tous ses adhérents qui se voient régulièrement dénigrés, insultés, moqués sur des sites, des blogs et peut-être demain sur Note2be.