Pouvez-vous nous présenter l’APAJH ?

L’APAJH réunit des femmes et des hommes qui veulent faire avancer la réflexion et l’action en faveur des personnes en situation de handicap. Si notre association a été créée en 1962 par des enseignants, en réaction à la carence de l’Éducation nationale dans l’accueil des jeunes handicapés, ses 14 000 collaborateurs interviennent aujourd’hui sur tout le champ du handicap.

Via nos 93 associations départementales et notre échelon national, nous gérons près de 700 établissements et services dédiés aux personnes en situation de handicap. Notre fédération nationale intervient auprès des décideurs publics, dans les commissions nationales et les groupes de travail pour faire bouger les lignes et tendre vers une société véritablement inclusive.

Notre action repose sur les valeurs de laïcité, de citoyenneté et de solidarité. Pour l’APAJH, il est primordial de favoriser la pleine citoyenneté des personnes en situation de handicap par l’accès à l’école, à la formation et à tous les domaines de la vie. L’enjeu est de lutter contre la discrimination et l’exclusion et de changer le regard porté sur les personnes en situation de handicap.

 

Dans quel contexte s’inscrit votre action ?

La place des personnes en situation de handicap a évolué ces dernières décennies avec des avancées sur le plan législatif et réglementaire (lois de 2002 et 2005). Pourtant, au quotidien, de nombreux obstacles empêchent la personne en situation de handicap d’être un citoyen à part entière, de pouvoir aller à l’école en milieu ordinaire, d’exercer un travail, de se déplacer, de faire ses démarches administratives, etc.

L’APAJH milite pour une société du vivre ensemble où la personne en situation de handicap a les mêmes droits et les mêmes devoirs que n’importe quel autre citoyen. Nous militons pour une approche collective du handicap fondée sur la solidarité nationale, indispensable à la cohésion sociale.

 

Quelles actions menez-vous au niveau scolaire ?

Nous avons formalisé en 2018 une liste de revendications pour une société véritablement inclusive tout au long de la vie, et bien sûr dès l’école. Celles-ci sont accessibles sur notre plateforme Société inclusive, sur laquelle chacun peut contribuer avec nous à la réflexion.

Sur le plan purement scolaire, nous avons renouvelé et mis à jour en 2020 la convention cadre signée en 2013 avec le ministère de l’Éducation nationale et le ministère des Affaires sociales, qui crée des synergies entre l’Éducation nationale et le secteur médico-social pour une école qui s’adapte aux différences.

Visant à mettre en place des solutions nouvelles, concertées et adaptées, cette coopération concerne principalement trois domaines :

  • la formation des acteurs de l’Éducation nationale ;
  • l’amélioration et la fluidification des parcours scolaires ;
  • l’accompagnement sur le terrain des personnels de l’Éducation nationale.

L’École de la République doit jouer un rôle essentiel pour que chaque enfant, chaque élève, quelles que soient ses difficultés, construise un parcours de formation qui lui permette de s’insérer dans la collectivité, de réaliser son projet de vie et d’être un citoyen à part entière.

 

Quel regard portez-vous sur les derniers dispositifs en date, notamment les PIAL ?

Les PIAL peuvent être des outils intéressants, et le recrutement de 8 000 AESH (accompagnants des élèves en situation de handicap) est évidemment une bonne chose. Mais cela demeure insuffisant et on est encore largement sur un effet d’annonce. Parallèlement, il y a un risque de démobilisation des enseignants qui pourraient considérer que le handicap dépend du PIAL et des AESH. Il faudrait au contraire les impliquer davantage eux-mêmes dans l’accueil des élèves handicapés, car tous n’ont pas besoin d’être accompagnés.

Aujourd’hui ces PIAL sont principalement un outil de gestion des AESH, plus qu’une vraie réponse de fond qui aide à fluidifier les parcours. À ce niveau, des équipes mobiles d’appui à la scolarisation se mettent progressivement en place dans certains départements, notamment pour créer davantage de liens avec le secteur médico-social et aider à trouver des solutions.

 

Quels sont d’après vous les défis qui restent à relever au niveau scolaire et les solutions à apporter ?

L’objectif, c’est d’arriver à transformer le système, et notamment ces PIAL, pour en faire de vrais outils au service de l’élève et éviter les ruptures de parcours. C’est un travail qui doit se poursuivre entre l’Éducation nationale et le secteur médico-social, sans posture et sans a priori, pour trouver des solutions adaptées pour chaque élève, alors qu’aujourd’hui beaucoup n’en ont pas ou sont en attente. Théoriquement cette coopération est la règle depuis 2013 et la loi sur la refondation de l’école, mais dans les faits elle est loin d’être généralisée.

L’autre enjeu, c’est d’améliorer la formation des enseignants sur l’accueil des élèves en situation de handicap. La loi prévoit à présent que 25 heures y soient consacrées dans leur formation initiale. Toutefois, c’était déjà le cas dans la plupart des cursus. Ensuite, sur deux années de formation, cela reste un volume très faible. Mais surtout, il faut réfléchir aux modalités de cette formation : plutôt qu’un bloc de 25 heures in abstracto, il serait plus utile de prévoir de petits modules appliqués à chaque discipline et de mettre le plus possible les enseignants en situation concrète, sur le terrain. On leur donnera ainsi de meilleurs repères, et on évitera les blocages.