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Entretien avec une ergonome Sorties scolaires : comment mieux prévenir les risques ?Laurence Bergugnat : « les métiers de l’enseignement sont particulièrement exposés au stress »

Comment définir les risques psychosociaux ?
Selon l’Agence européenne pour la santé et la sécurité au travail, ce sont des contraintes psychologiques, mentales, sociales et organisationnelles au travail, susceptibles d’induire des effets néfastes sur la santé. Les risques psychosociaux peuvent entraîner des pathologies professionnelles : dépressions, maladies psychosomatiques, problèmes de sommeil, mais aussi générer des troubles musculo-squelettiques, des maladies cardio-vasculaires, voire des accidents du travail.
Les personnels de l’éducation sont-ils particulièrement exposés au stress ?
De nombreuses recherches confirment une pénibilité des métiers impliquant :
- une responsabilité morale, comme pour les métiers de l’enseignement et de l’éducation ;
- une relation d’aide et de soin (médecins, infirmières, travailleur social, etc.) ;
- ou un risque corporel ou matériel (policiers, pompiers, convoyeurs de fonds, etc.).
Une étude de la MGEN publiée en 2011 dans le cadre de son « carrefour santé social » indiquait que 24% des agents de l’Education nationale étaient en état de tension au travail et 14% d’entre eux en épuisement professionnel.
Concernant les facteurs de stress, une étude du CSEE (Comité syndical européen de l’éducation) menée en 2007 auprès de 38 syndicats d’enseignants de 27 pays de l’Union européenne et de pays candidats soulignait que la première source de stress est la charge et l’intensité de travail. Ces manifestations déclarées étaient d’abord l’épuisement professionnel, suivi de l’absentéisme et des maladies liées à ce syndrome.
Quels sont les symptômes du burnout ? Comment se traduit-il ?
Le processus du burnout se développe dans la durée et en plusieurs étapes. Tout d’abord, le professionnel connaît un épuisement de ses ressources émotionnelles face aux situations professionnelles exigeantes. Cela se traduit par l’adoption d’une attitude cynique à l’égard des autres ainsi qu’un désengagement du travail. L’épuisement professionnel n’est pas synonyme de dépression. La personne épuisée professionnellement est irritable, agressive plutôt que d’humeur dépressive. Sa vitalité est modérée mais pas anéantie comme dans la dépression majeure. Les problèmes de sommeil prennent la forme de difficultés d’endormissement plutôt que de réveils nocturnes. Mais dans les deux cas, les problèmes d’attention ou de confusion mentale qui en découlent restent des problèmes majeurs susceptibles de réduire l’efficacité des personnels dans leur travail et de provoquer des accidents. La dépression peut toutefois être envisagée comme le degré ultime de cet épuisement vital, se traduisant par exemple sous la forme d’idées suicidaires, non présentes dans le syndrome de burnout.
Disposez-vous de chiffres sur le burnout des enseignants ?
Notre dernière étude sur le burnout des enseignants débutants réalisée entre 2008 et 2012 montre que 7,5% d’entre eux sont en burnout dès l’année de formation, soit un sur treize. D’après cette étude, les débuts dans l’enseignement peuvent être douloureux, d’autant plus que l’on sait qu’une personne en état de burnout exige une prise en charge thérapeutique (consulter cette étude).
Comment prévenir les risques psychosociaux dans les métiers de l’éducation ?
C’est par une approche globale (et pas seulement par facteurs de risques) de l’environnement du travail que les collectifs de professionnels dans les établissements scolaires peuvent œuvrer à la réduction du stress et à la protection de leur santé mentale et physique. Il s’agit de chercher à maintenir les ressources existantes (psychosociales, matérielles, organisationnelles, personnelles), et à les développer pour permettre l’exercice du métier dans des conditions favorables à un épanouissement professionnel au service de la réussite des élèves. Cette approche dite « écologique » repose sur la volonté de la communauté d’interroger les pratiques ordinaires d’enseignement, d’éducation, de vie d’équipe, de communication, pour en déceler les impasses et dysfonctionnements, mais aussi pour trouver collectivement le pouvoir d’agir sur les situations nocives.
Une telle stratégie de prévention exige quelques conditions :
- un personnel encadrant formé à un management éthique et social ;
- des personnels de l’éducation informés sur ce sujet pour s’en protéger, pour trouver des solutions en commun et sortir de l’isolement ;
- le développement par l’employeur d’une véritable politique de prévention du stress au travail qui est encore à ce jour beaucoup trop timide.
N’oublions pas de mentionner la nécessité de créer des réseaux de solidarité et d’entraide, ainsi que des réseaux de promotion de la santé qui réunissent les personnes ressources du secteur de la santé, du social, de l’orientation, de la justice, sur lesquelles le personnel individuellement ou collectivement pourra s’appuyer en cas de besoin. L’Autonome de Solidarité Laïque fait partie de ces acteurs-clés.
Références
BERGUGNAT L. (2014). « Enseignants », in Zawieja Ph., Guarnieri F., Dictionnaire des risques psychosociaux, Paris, Le Seuil, 254-257.
JANOT-BERGUGNAT L., RASCLE N. (2008), Le stress des enseignants, Paris, Armand Colin.
BERGUGNAT-JANOT L., CAMIN J. L., RASCLE (2007), Prévenir le stress, paroles d’enseignants (DVD), coédition IUFM d’Aquitaine-Scéren CRDP.