Outils numériques, quelle protection pour les enseignants ?

Bien qu’un an soit passé depuis la première période d’école à distance, la « continuité pédagogique » depuis la deuxième fermeture des écoles a mis en avant les difficultés, tant pour les enseignants que pour les élèves, dans l’utilisation des outils numériques officiels.

Les environnements numériques de travail bloqués de l’Éducation nationale ont, en effet, obligé nombre de personnels d’éducation à utiliser de nouveau, pour garder le lien avec les élèves et continuer leur apprentissage, des canaux parallèles tels que WhatsApp ou encore Discord, prenant ainsi des risques notamment en termes de protection de leurs données personnelles ou encore d’intrusions informatiques.

C’est pourquoi L’ASL avait proposé, dans le cadre des États généraux du numérique, pour assurer la protection des personnels, de mettre à la disposition de ces derniers un outil numérique dédié, adapté dans le cadre d’une indépendance numérique.

L’usage des outils numériques comme instruments d’agression envers les personnels

Dans le cadre de sa mission d’observation du climat scolaire dans les établissements, L’Autonome de Solidarité Laïque a répertorié et analysé l’ensemble des dossiers ouverts par ses adhérents ainsi que les remontées directes de terrain pour comprendre l’impact de la première période de confinement sur le fonctionnement de l’école et sur celui des familles. Une analyse traduite dans un livre blanc intitulé Covid-19, continuité pédagogique et risques du métier.

Parmi les constats qui ont pu ressortir figure celui d’une hausse significative des violences dites « numériques ». Si les agressions des personnels d’éducation par différentes formes sont, hélas, devenues un lieu commun et un sujet d’inquiétude, L’ASL a constaté, dans le contexte particulier de la crise sanitaire et de l’usage systématique des technologies de communication à une échelle encore jamais atteinte, un nombre de dossiers important en lien avec des insultes, menaces, propos diffamatoires d’élèves sur les réseaux numériques et des intrusions en classe virtuelle.

Cela s’accompagne par ailleurs d’une sensibilité différente des victimes : plus intrusives, plus invasives, les intrusions sur les réseaux sont devenues un nouveau « risque du métier » auquel les personnels font encore face.

Des conflits encore présents avec les parents d’élève

Dans cette même étude, L’ASL n’a certes pas constaté d’amplification des dysfonctionnements dans la relation parents/enseignants, mais celle-ci n’a pas été apaisée pour autant. Les dossiers traités par L’Autonome à cette période montrent que le nombre d’« incivilités » est resté proportionnellement très proche de celui observé en temps ordinaire (deux tiers des dossiers annuels).

Il s’agit par ailleurs des mêmes causes, souvent des incompréhensions non résolues sur la méthode d’enseignement, et sur la tendance parfois forte de certaines familles à prétendre mieux connaître les fondements de l’enseignement que l’enseignant.

Avec la modification des canaux d’échanges entre enseignants et parents, souvent en contact direct et sans aucun filtre (ex. : communication par mail et plus via les cahiers de liaison ou les plateformes institutionnelles), l’augmentation des risques pour les personnels est bien réelle, notamment avec une possible forme de harcèlement par des sollicitations mail incessantes et sans aucun cadre.

L’ASL, qui milite depuis toujours pour une meilleure protection des personnels, a affirmé à plusieurs reprises à l’institution la nécessité de mettre en place un cadre protecteur dans le cadre de l’école à distance. Cela peut prendre, par exemple, la forme d’une circulaire et d’un règlement intérieur afin que l’ensemble des acteurs de la communauté éducative trouve les repères et les limites à ne pas franchir. Comme c’est le cas pour l’école sur site, les règlements cadrent la place et le rôle de tous. Cela permettra aux enseignants de bénéficier sans contestations ni reproches de temps de déconnexion, et aux parents de ne pas franchir les limites du temps induites par le numérique, qui pourrait laisser penser que tout est possible à n’importe quelle heure et à tout moment.