La cour d’école constitue un lieu d’apprentissage du lien social dans lequel le jeu tient une place prépondérante. Pourtant, certains jeux peut mettre les enfants en danger de mort. L’actualité le rappelle régulièrement. Même si l’on ne peut chiffrer exactement l’ampleur de ces pratiques (plus de 20 % des collégiens s’y adonneraient¹), elles sont récurrentes dans les cours de récréation, et ce, de la maternelle au lycée. Avec l’avènement des portables et des réseaux sociaux, de nouvelles formes de « jeux » dangereux apparaissent, parfois filmées et diffusées. Confrontés à ces risques, les personnels d’éducation des établissements des premier et second degrés doivent apprendre à repérer les jeux dangereux à l’école et redoubler de vigilance.

Ce que disent les chiffres sur les jeux dangereux en milieu scolaire

“ 33,8 % des collégiens affirment avoir déjà participé à un jeu dangereux. ”

En 2019, Thibaut Hébert, Mickaël Vigne et Benoît Maréchaux ont interrogé 19 000 collégiens de 64 collèges dans le cadre d’une étude à l’initiative de l’académie de Lille². L’étude parue en 2021 révèle que :

  • 33,8 % des collégiens ont déjà joué à un jeu dangereux, sans différence filles/garçons.
  • Environ 50 % ont fait leur première expérience de jeu dangereux à l’école élémentaire, dans les classes de CM1/CM2.
  • Pour environ 60 % des collégiens concernés, la cour de récréation est le lieu privilégié pour s’adonner à un jeu dangereux. Viennent ensuite le préau, le hall et les casiers pour 50 % d’entre eux.
  • Parmi les collégiens concernés, 76,8 % ont déjà pratiqué un jeu de défi, la catégorie la plus « populaire », dont le succès est notamment porté par les réseaux sociaux.

Apprendre à repérer les jeux dangereux à l’école

“ Les jeux dangereux regroupent trois grandes catégories : les jeux de non-oxygénation, les jeux d’agression et les jeux de défi, pouvant se combiner entre eux. ”

Il y en existe plus de 80. Le guide Les jeux dangereux et les pratiques violentes a été édité par le ministère de l’Éducation nationale pour aider la communauté éducative à prévenir et repérer ces pratiques. Publié en 2007, il ne recense pas ceux apparus depuis, mais reste d’actualité quant aux typologies de jeux pratiqués et aux conseils de prévention.

Les jeux dangereux regroupent trois grandes catégories : les jeux de non-oxygénation, les jeux d’agression et les jeux de défi, pouvant se combiner entre eux. 

  • Les « jeux » de non-oxygénation reposent sur l’asphyxie, la strangulation ou la suffocation pour ressentir des sensations dites intenses. Le plus connu d’entre eux est le jeu du foulard.
  • Les « jeux » d’agression consistent à faire usage de la violence physique gratuite, généralement d’un groupe envers une cible. On distingue les jeux intentionnels, lorsque tous les enfants participent de leur plein gré aux pratiques violentes, des jeux contraints, lorsque l’enfant qui subit la violence du groupe n’a pas choisi de participer. Cette seconde catégorie est exclue des « jeux » par certains auteurs qui la considèrent comme du harcèlement scolaire (school bullying)². Parmi les jeux d’agression intentionnels, il existe celui où plusieurs écoliers encerclent un camarade pour le pousser et le renvoyer, en plaçant leurs bras en croix sur leur torse. L’enfant ciblé est parfois prêt ; parfois, il est pris par surprise. C’est alors que le jeu devient le plus dangereux.
  • Les « jeux » de défi reposent sur le principe « cap ou pas cap ? ». Au sein d’un groupe, des élèves vont relever un ou plusieurs challenges de plus en plus risqués soit pour l’enfant qui le pratique, soit pour celui qui en est la cible. Le « jeu de l’escalier » consiste à provoquer une bousculade dans les escaliers de l’établissement. Le jeu « Blue Whale », notoire sur les réseaux sociaux, permet d’entrer via un parrainage, dans une spirale de 50 défis de risque croissant dont l’ultime étape est le suicide. Début 2025, l’assurance maladie en France alertait sur les dangers du « paracétamol challenge », un défi répandu sur les réseaux sociaux, qui incite à consommer des quantités excessives de paracétamol³.

Des exemples combinent agression et défi.

  • 2021 : des écoliers se sont mis à reproduire dans la cour de récréation les jeux de la série Netflix « Squid Game », pourtant interdite aux moins de 16 ans, et notamment le « 1, 2, 3, soleil », frappant ou jetant des cailloux aux perdants. Face aux risques, l’Éducation nationale a envoyé un message d’alerte à tous les directeurs des académies en région, les directeurs académiques des services de l’Éducation nationale (DASEN), pour les prévenir du phénomène, des cas ayant été signalés. Il a été également demandé aux directeurs des services de veiller à l’identification et à la prévention de cette pratique. Le phénomène est cependant resté très marginal comparé à celui du harcèlement ou au jeu du foulard.
  • 2023 : le jeu de la virgule, devenu viral, consiste à donner des coups secs à l’arrière de la nuque d’un camarade, par surprise. La victime est filmée, pour diffuser sa réaction sur TikTok. Le geste risque d’engendrer le coup du lapin et un traumatisme cervical. Les académies ont alerté le personnel scolaire, et la police nationale a diffusé un message sur X, pour endiguer la pratique. La police rappelait notamment que « enregistrer et diffuser des images de violence sur internet est puni par la loi »⁴.

Ces pratiques dangereuses se propagent aujourd’hui à la vitesse de l’éclair sur les réseaux sociaux ou les plateformes de discussion qui contribuent à la multiplication des challenges et à leur promotion.

Une proposition de loi a été déposée en début d’année 2025⁵, intégrant « une information préalable avec l’insertion dans les carnets de santé papier et numérique de nos enfants d’une rubrique prévention portant sur la connaissance des signes d’alerte sur ces pratiques et les risques inhérents. »

Quelles réponses face aux jeux dangereux ?

“ Les articles L421-10 et D321-12 du Code de l'éducation imposent aux établissements scolaires de garantir la sécurité et la surveillance des élèves. ”

Plusieurs textes réglementaires définissent les responsabilités des établissements et les mesures à mettre en œuvre pour protéger les élèves.

Cadre juridique

Code de l’éducation
Les articles L421-10 et D321-12 du Code de l’éducation⁶ imposent aux établissements scolaires de garantir la sécurité et la surveillance des élèves. Cette obligation comprend la prévention des comportements à risque, notamment ceux liés aux jeux pouvant nuire à l’intégrité physique des enfants.

Le règlement intérieur des établissements
Chaque établissement scolaire dispose d’un règlement intérieur précisant les règles de vie commune. Celui-ci doit explicitement interdire les jeux dangereux et prévoir des sanctions en cas d’infraction.

Les circulaires ministérielles
Le ministère de l’Éducation nationale a publié plusieurs circulaires, à l’occasion des rentrées scolaires notamment, soulignant l’importance de prévenir les comportements à risque et de sensibiliser les élèves aux dangers de certains jeux. Ces textes rappellent les bonnes pratiques à adopter pour assurer un climat scolaire serein.

Les responsabilités des chefs d’établissement

Les chefs d’établissement, directeurs et directrices d’écoles sont responsables de la sécurité des élèves. Ils doivent :

  • Mettre en œuvre des actions de prévention,
  • Informer les élèves et familles sur les risques associés à certains jeux,
  • Interdire et sanctionner toute pratique jugée dangereuse.
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Bon à savoir

Certains jeux peuvent s’apparenter à des formes de harcèlement entre élèves. La loi n° 2019-791 du 26 juillet 2019 pour une école de la confiance renforce les dispositifs de lutte contre le harcèlement scolaire, y compris ceux liés à ces jeux.

Les actions à mettre en place

Le site Éduscol⁸ met à votre disposition des fiches d’accompagnement « actions de prévention », des brochures et des guides d’intervention. L’association APEAS⁹, fondée par Françoise Cochet, publie des actualités et de la documentation pour accompagner, prévenir, éduquer, agir et sauver.

Exemples d’actions concrètes à mettre en œuvre pour lutter contre les jeux dangereux :

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Le point de vue de L'ASL :

Apprendre à connaître et à reconnaître les jeux dangereux et pouvoir ainsi en parler est la première étape pour les faire cesser. Dès lors, vous pouvez rapidement engager une démarche de prévention. En dehors de tout incident repéré dans l’établissement, cette démarche peut s’inscrire dans le cadre du projet éducatif global de l’école. L’ASL recommande aux équipes éducatives de se montrer vigilantes quant à l’utilisation des téléphones portables, d’adopter une attitude ferme quant au respect du règlement intérieur de l’établissement, et de pratiquer une surveillance efficace dans les lieux présentant le plus de risques (cour de récréation en premier lieu, couloirs, toilettes, etc.).

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