Violences verbales : définition et sanctions

« Des personnels d’éducation sont victimes de violences verbales sous différentes formes : injures, propos diffamatoires, propos discriminatoires, menaces, harcèlement, etc. »

Des personnels d’éducation sont victimes de violences verbales sous différentes formes : injures, propos diffamatoires, propos discriminatoires, menaces, harcèlement, etc.

Ces infractions, définies et sanctionnées par le Code pénal, relèvent du domaine contraventionnel ou délictuel, en fonction de leur gravité et des circonstances. Les contraventions sont des infractions sanctionnées moins lourdement que les délits.

Illustrations :

  • La diffamation est définie dans la loi du 29 juillet 1881 : « Toute allégation ou imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé est une diffamation(3). »
  • La diffamation est publique lorsqu’elle peut être entendue ou lue par un public étranger à la personne qui en est coupable et à la victime. Proférer des propos diffamatoires dans l’enceinte d’un établissement scolaire devant plusieurs personnes, par exemple, est constitutif d’un délit de diffamation publique. À l’inverse, diffamer une personne par SMS ou par courrier, entre autres moyens, constitue une diffamation non publique.
  • La diffamation publique constitue un délit puni d’une amende de 12 000 euros. On parle de circonstances aggravantes lorsque la diffamation publique est raciste ou discriminatoire : la sanction encourue est d’un an de prison et de 45 000 euros d’amende.
  • La diffamation non publique est une contravention sanctionnée par une amende de 38 euros. La loi prévoit un délit spécial pour protéger les enseignants : l’outrage à agent(4). Si l’enseignant est victime de diffamation non publique dans l’exercice de ses fonctions, l’auteur des faits est plus lourdement sanctionné : 6 mois de prison et 7 500 euros d’amende.

Le point de vue de L’ASL

Lorsque le dialogue ne semble plus possible avec un tiers, il évolue trop souvent vers ces formes de violences verbales.

Il n’est pas rare, sans recourir systématiquement à des poursuites contre un tiers, que les équipes de L’ASL – par la voix et l’écrit de l’avocat-conseil départemental – rappellent à celle ou à celui qui a proféré insultes ou propos diffamatoires, que la loi s’impose à eux.

La lettre dite « comminatoire » vise à ramener chacun à la juste raison. Il s’agit d’une injonction envers la personne à laquelle elle s’adresse d’avoir à cesser immédiatement ses comportements. À défaut, cette personne est d’ores et déjà informée qu’une procédure judiciaire pourrait éventuellement être engagée à son encontre si elle persiste dans son attitude.

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Violences physiques : définition et sanctions

« Les actes de violence physique constituent des infractions punies par la loi : contravention, délit ou crime. La qualification et la sanction pénale attachée dépendent de la gravité des blessures infligées à la victime. »

Les actes de violence physique portent atteinte non seulement à la dignité, mais aussi à l’intégrité physique. Bien que plus rares en pratique que les violences verbales, leurs conséquences peuvent s’avérer graves. Le cas échéant, elles font souvent l’objet d’une large médiatisation.

Les actes de violence physique constituent des infractions punies par la loi : contravention, délit ou crime. La qualification et la sanction pénale attachée dépendent de la gravité des blessures infligées à la victime.

Selon l’article 222-11 du Code pénal, « les violences ayant entraîné une incapacité totale de travail pendant plus de huit jours sont punies de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende(5) ».

Le Code pénal prévoit une circonstance aggravante si ces violences sont exercées contre un enseignant ou tout membre des personnels travaillant dans les établissements d’enseignement scolaires ou toute personne chargée d’une mission de service public. Dans ce cas, la peine encourue est de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende.

Pour « les violences ayant entraîné une incapacité de travail inférieure ou égale à huit jours ou n’ayant entraîné aucune incapacité de travail(6) », l’article 222-13 du Code pénal prévoit que si celles-ci sont commises sur un enseignant ou tout membre des personnels travaillant dans les établissements d’enseignement scolaires, la sanction est de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende.

Dans un arrêt du 9 mai 2018, la cour d’appel de Douai a condamné une mère d’élève coupable de violences à l’encontre d’une enseignante d’école élémentaire à une peine de 18 mois de prison assortie d’un sursis avec mise à l’épreuve pendant deux ans et 800 euros de dommages et intérêts.

 

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Les procédures possibles

« Différentes actions peuvent être envisagées par la victime : la plainte simple, la plainte avec constitution de partie civile, la citation directe. »

Victimes de violences au sein de leur établissement, les personnels de l’Éducation nationale peuvent signaler ces faits à la justice par différents moyens. L’objectif premier est la sanction pénale de l’auteur de l’infraction, mais la victime peut aussi demander au juge pénal la réparation du préjudice que l’infraction lui a causé.

Différentes actions peuvent être envisagées par la victime.

1 – La plainte simple

La plainte simple sert à faire sanctionner l’auteur des violences. Elle peut être déposée :

  • Sur place, au commissariat de police ou à la gendarmerie. Dans le département de la Sarthe, les autorités expérimentent la plainte par visioconférence.
  • Par courrier au procureur de la République.

La plainte déclenche une enquête de police. Le procureur de la République, sur cette base, décide de poursuivre ou non l’auteur des violences.

Quatre issues sont possibles à la suite d’un dépôt de plainte simple :

  • Le procureur de la République saisit le juge d’instruction pour mener une enquête.
  • Le procureur de la République propose des mesures alternatives aux poursuites : médiation pénale, par exemple.
  • Le tribunal est saisi pour juger l’auteur des violences commises à l’encontre de l’enseignant.
  • Le procureur de la République ne se prononce pas, ou classe la plainte sans suite. Dans cette situation, l’enseignant victime peut porter plainte avec constitution de partie civile.

2 – La plainte avec constitution de partie civile

La plainte avec constitution de partie civile permet à l’enseignant victime de demander la condamnation de l’auteur des violences, mais aussi la réparation de son préjudice. Il est possible de porter plainte avec constitution de partie civile dans deux cas :

  • L’enseignant est victime d’un « délit de presse » : violence morale de type injure ou diffamation, notamment.
  • L’enseignant a déposé une plainte simple, et le procureur de la République l’a classée sans suite ou ne s’est pas prononcé dans un délai de 3 mois.

La plainte avec constitution de partie civile est adressée par courrier au juge d’instruction.

3 – La citation directe

La citation directe permet à l’enseignant victime de violences physiques ou morales de saisir directement la juridiction compétente. Elle est adaptée lorsque les faits sont incontestables et que l’auteur des violences est connu. Dans ce contexte, en effet, nul besoin d’ouvrir une enquête.

L’enseignant victime doit préalablement avoir réuni les éléments de preuves démontrant la culpabilité de l’auteur et des documents justifiant des préjudices subis. Une consignation est fixée par le tribunal.

Le point de vue de L’ASL

La plainte et la citation directe ne sont pas des démarches anodines. Insuffisamment documentées et argumentées, elles n’aboutissent pas. Des plaintes sont ainsi classées sans suite au seul motif qu’elles ne décrivent pas correctement une infraction caractérisée. Les démarches peuvent en outre se retourner contre la victime, si elles sont jugées abusives.

Les militants de L’ASL, accompagnés des salariés et des avocats-conseil, sont présents dans tous les départements. Ils ont pour mission de soutenir et d’orienter les adhérents. Ils peuvent aussi les conseiller dans cet acte juridique important.

Les procédures disciplinaires à l’encontre des auteurs de violences à l’école

Parallèlement et concomitamment aux procédures devant les juridictions pénales, une procédure disciplinaire peut être diligentée à l’encontre de l’auteur des violences. Dans le second degré, il revient au chef d’établissement de saisir obligatoirement le conseil de discipline de l’établissement lorsqu’un membre du personnel est victime de violences physiques.

Dans l’affaire des violences infligées à l’enseignante au lycée Édouard Branly de Créteil, le conseil de discipline prononçait en novembre 2018 une exclusion définitive de l’élève auteur des faits.

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La protection renforcée de l’enseignant victime de violences dans l’exercice de ses fonctions

« Lorsque les violences sont commises dans l’exercice de ses fonctions, l’enseignant bénéficie de la protection fonctionnelle. »

 Lorsque les violences sont commises dans l’exercice de ses fonctions, l’enseignant bénéficie de la protection fonctionnelle.

 Cette protection est notamment renforcée de deux manières  :

  • Si l’enseignant victime engage des poursuites judiciaires, ses frais de procédure, et éventuellement ses frais d’avocat, sont pris en charge.
  • En l’absence de procès, l’enseignant peut obtenir réparation de son préjudice auprès de la collectivité publique. La collectivité peut, ultérieurement, engager des poursuites pour rembourser les dommages et intérêts versés à l’enseignant.

Zoom sur les recommandations de la mission

Actuellement, la protection fonctionnelle n’est pas systématique. La mission conjointe de contrôle prévoit à cet égard la recommandation n° 26, publiée en date du 6 mars 2024. « Afin d’améliorer le recours à la protection fonctionnelle du personnel, rendre automatique l’octroi de la protection fonctionnelle pour les agents de la communauté éducative victimes de violences et outrages du fait des élèves, des parents d’élèves ou de tiers ; l’administration aurait la faculté de la retirer dans un second temps(7) ». Cette recommandation est une piste de travail pour garantir une protection plus efficace des enseignants.

D’autres recommandations envisagent de faciliter les procédures ouvertes aux enseignants victimes de violences à l’école.

Illustrations :

  • La généralisation des référents identifiés dans chaque brigade de gendarmerie ou de commissariat pour renseigner les agents de l’Éducation nationale sur le dépôt de plainte.
  • La possibilité pour l’administration de déposer plainte elle-même (en lieu et place de l’agent) en cas d’agression d’un agent.
  • L’accélération de l’audiencement.

Sources

  1. L’école de la République attaquée : agir pour éviter de nouveaux drames (PDF) | Senat.fr
  2. Mission conjointe de contrôle sur le signalement et le traitement des pressions, menaces et agressions dont les enseignants sont victimes – Examen du rapport et vote sur les recommandations, 5 mars 2024
  3. Article 29 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse : Délits contre les personnes
  4. Article 433-5 du Code pénal : De l’outrage
  5. Article 222-11 du Code pénal : Des violences
  6. Article 222-13 du Code pénal : Des violences
  7. Mission conjointe de contrôle sur le signalement et le traitement des pressions, menaces et agressions dont les enseignants sont victimes : les recommandations (PDF) | Senat.fr