Si le visage d’une personne est flouté, est-ce suffisant pour se passer de l’autorisation de droit à l’image pour publier une photo ?

« Ainsi, le simple fait que le visage soit flouté peut dans certaines conditions ne pas être suffisant dès lors que l’on peut identifier la personne, notamment par sa voix, son nom, un décor, un tatouage, etc. »

Le droit à l’image découle de l’article 9 du code civil(1) qui dispose que « toute personne a droit au respect de sa vie privée », y compris au respect de son image. La Cour de cassation a ensuite précisé que « toute personne a sur son image un droit exclusif et absolu et peut s’opposer à sa fixation, à sa reproduction ou à son utilisation sans autorisation préalable(2) ».

Ainsi, toute diffusion de l’image d’une personne nécessite une autorisation préalable de la part de l’intéressé. S’agissant des mineurs, une autorisation de chaque titulaire de l’autorité parentale est requise.

Le droit à l’information peut être une limite posée à la nécessité d’une autorisation, mais il faut que la personne ne soit pas identifiable et reconnaissable.

Ainsi, le simple fait que le visage soit flouté peut dans certaines conditions ne pas être suffisant dès lors que l’on peut identifier la personne, notamment par sa voix, son nom, un décor, un tatouage, etc.

La jurisprudence a, par exemple, eu l’occasion de sanctionner la violation du droit exclusif de disposer de son image ainsi que de l’utilisation qui en est faite en rappelant que « peu importe que le visage du demandeur soit flouté ou non dès lors que le reste de son corps, attribut du droit à l’image apparaissait(3) » (TGI Paris, ordonnance de référé, 16 novembre 2018).

À défaut d’identification, il ne saurait y avoir d’atteinte au droit à l’image.

Par prudence, nous recommandons d’obtenir l’autorisation écrite et précise (durée, supports de diffusion, etc.) pour utiliser l’image d’une personne.

Y a-t-il des exceptions où l’autorisation du détenteur du droit à l’image – ou de ses représentants s’il s’agit d’un mineur – n’est pas nécessaire ? Quelles sont les limites de la protection du droit à l’image ?

« La liberté de la presse et le droit à l’information permettent à certaines conditions de limiter le droit à l’image lorsque celle-ci est utilisée à des fins d’information, d’actualité, dans le cadre d’un sujet historique ou d’intérêt général. »

Le droit à l’image doit être concilié avec la liberté d’information et de communication proclamée par l’article 11 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen(4) et par l’article 10 de la convention européenne des droits de l’homme(5).

Ainsi, la liberté de la presse et le droit à l’information permettent à certaines conditions de limiter le droit à l’image lorsque celle-ci est utilisée à des fins d’information, d’actualité, dans le cadre d’un sujet historique ou d’intérêt général. Il ne doit pas porter atteinte à la dignité de la personne représentée et l’exploitation de l’image ne doit pas être utilisée à des fins commerciales ou publicitaires.

Lorsque l’image n’est pas centrée sur la personne ou que la personne n’est pas identifiable, aucune autorisation n’est requise pour exploiter l’image.

Par ailleurs, dans le cadre de ses fonctions, un personnage public photographié, enregistré ou filmé ne peut s’opposer à la diffusion de son image.

S’agissant de la captation et de la diffusion des images et de la voix des mineurs, même dans le cadre informatif, par exemple à l’occasion d’un reportage presse, la prudence est de rigueur.

C’est d’ailleurs le sens des autorisations spécifiques qui sont délivrées par les académies aux représentants légaux des mineurs.

Dénommé « autorisation parentale ponctuelle d’enregistrement et d’utilisation à des fins médiatique (presse) ou par des tiers de l’image/de la voix d’une personne mineure », ce document permet de laisser la possibilité d’autoriser ou de refuser la captation, la diffusion de l’image (fixe ou animée) ou l’enregistrement de la voix de l’enfant dans le cadre d’un reportage presse ou d’un évènement pouvant donner lieu à une publication par des tiers (extérieurs à l’école ou à l’établissement), en lien avec son activité dans son école ou dans son établissement scolaire(6).

Cette autorisation est à remplir par l’école ou l’établissement scolaire, les représentants légaux et l’élève en fonction de son âge.

 

Quand les parents ont donné leur autorisation de filmer leur enfant dans le cadre d’un évènement (sortie, spectacle, fête de l’établissement, etc.), cela signifie-t-il qu’on peut ensuite diffuser librement la vidéo ou des extraits de la vidéo sur les réseaux sociaux ou le site de l’établissement ?

« Toute prise de vue, toute utilisation de l’image dans le cadre scolaire impliquent que des autorisations expresses des représentants légaux soient obligatoirement et préalablement régularisées. »

Toute prise de vue, toute utilisation de l’image dans le cadre scolaire impliquent que des autorisations expresses des représentants légaux soient obligatoirement et préalablement régularisées.

Le ministère de l’Éducation nationale et de la Jeunesse a édité un modèle d’autorisation parentale de prises de vue d’un mineur et d’utilisation d’images le représentant(7).

Ce document type permet de recueillir le consentement et les autorisations nécessaires pour l’utilisation de l’image d’un mineur. Cette autorisation est précise, car elle prévoit la désignation du projet pédagogique concerné, les modes d’exploitation envisagés : internet, réseaux sociaux, site en accès réservé (ex. : ENT, plateforme de formation, etc.) ; s’il s’agit d’une projection collective (usage dans la classe, usage institutionnel, etc.). La durée d’autorisation et de conservation est également précisée : il s’agit en général d’une année scolaire. Toutefois, en vertu des dispositions du RGPD, les représentants légaux peuvent demander à tout moment le retrait des images.

On retrouve d’ailleurs ce type d’autorisation qui est aujourd’hui délivrée par les mairies dans le cadre des activités de centre de loisirs/sportifs, de restauration scolaire et périscolaire, dans les établissements d’accueil du jeune enfant comme les crèches, bibliothèques, etc.

Lorsqu’une telle autorisation définit précisément les contours d’utilisation de l’image d’une personne, ces limites s’imposent à l’utilisateur qui ne pourra l’utiliser que dans les conditions inscrites dans l’autorisation. Une nouvelle autorisation sera alors requise pour de nouvelles diffusions.

Sources

  1. Code civil : article 9
  2. Cour de cassation, chambre civile 1, 27 février 2007, n° 06-10393
  3. TGI de Paris, ordonnance de référé du 16 novembre 2018
  4. Déclaration du 26 août 1789 des droits de l’homme et du citoyen : article 11
  5. Convention européenne des droits de l’homme : article 10, p. 12 (PDF) | Council of Europe
  6. Exemple d’autorisation parentale ponctuelle d’enregistrement et d’utilisation à des fins médiatiques (presse) ou par des tiers de l’image/de la voix d’une personne mineure (PDF) | Académie d’Amiens
  7. Modèle d’autorisation parentale d’enregistrement et d’utilisation de l’image/de la voix d’une personne mineure pour un projet pédagogique (PDF) | Académie d’Aix-Marseille