Qu’est-ce que la propriété intellectuelle ?

« La propriété intellectuelle désigne l’ensemble des droits portant sur les créations (inventions, œuvres littéraires et artistiques, images, design, etc.). »

La propriété intellectuelle (PI) désigne l’ensemble des droits portant sur les créations (inventions, œuvres littéraires et artistiques, images, design, etc.). Elle confère aux titulaires (créateurs, déposants, etc.) des droits de propriété exclusifs sur leurs créations.
Le droit de la propriété intellectuelle se divise en deux branches : la propriété industrielle et la propriété littéraire et artistique.

Le Code de la propriété intellectuelle (CPI) est un document législatif créé par la loi n° 92-597 du 1er juillet 1992(1) relative au code de la propriété intellectuelle, publié au Journal officiel du 3 juillet 1992. Il regroupe toutes les lois ayant trait à la protection des œuvres de l’esprit.

Les droits d’auteur

« Le droit d’auteur protège toutes les œuvres de l’esprit, quels qu’en soient le genre, la forme d’expression, le mérite ou la destination. »

Le droit d’auteur protège « toutes les œuvres de l’esprit, quels qu’en soient le genre, la forme d’expression, le mérite ou la destination(2) » (article L112-1 du Code de la propriété intellectuelle). Il s’agit par exemple de livres, de chansons, de films, de peintures, de photographies, etc.

Depuis la loi relative au droit d’auteur et aux droits voisins dans la société de l’information de 2006 – dite loi DADVSI(3) (droit d’auteur et aux droits voisins dans la société de l’information) –, les enseignants sont également titulaires de droits d’auteur sur leurs cours, selon certaines conditions sur lesquelles nous reviendrons plus bas.

Au sein de ces droits d’auteur, on distingue deux grandes catégories :

  • Les droits moraux, qui sont inaliénables, c’est-à-dire qu’ils sont directement rattachés à une personne en raison de ce qu’elle est et ne peuvent être vendus à une autre personne (ils sont transmis aux héritiers au décès de l’auteur).
  • Les droits patrimoniaux(4), qui peuvent être transférés ou cédés. Ces derniers sont liés à l’exploitation de l’œuvre, notamment en termes de reproduction et de représentation.

L’utilisation d’œuvres dans les supports pédagogiques

« Une licence libre signifie que l’auteur laisse au public la possibilité d’utiliser et de diffuser son œuvre sans avoir besoin de solliciter son autorisation. »

Lorsqu’on souhaite intégrer une ou plusieurs œuvres soumises à des droits d’auteur dans un cours ou un support pédagogique que l’on souhaite diffuser publiquement, la première question à se poser est celle du régime de droit : s’agit-il d’un régime de licence libre ou bien d’un régime de droit commun ?

  • Une licence libre signifie que l’auteur laisse au public la possibilité d’utiliser et de diffuser son œuvre sans avoir besoin de solliciter son autorisation tout en respectant ses droits moraux d’auteur comprenant notamment la citation de son nom.
  • Le droit commun s’applique lorsqu’il faut obtenir l’autorisation de l’auteur ou de ses héritiers pour utiliser l’œuvre, et si l’auteur est vivant ou décédé depuis moins de 70 ans.

L’exception pédagogique et les accords nationaux

« On peut […] utiliser un extrait d’une œuvre pour appuyer un propos ou étayer une argumentation dans le cadre d’un cours, de travaux d’élèves, ou encore de sessions de formation d’enseignants. »

Toutefois, il existe en France une « exception pédagogique »(5) qui « correspond essentiellement à des accords sectoriels négociés contre une rémunération forfaitaire permettant d’utiliser des œuvres dans un but pédagogique, c’est-à-dire à des fins exclusives d’illustration dans le cadre de lenseignement et de la recherche, à destination d’un public majoritairement composé d’élèves, d’étudiants, d’enseignants ou de chercheurs directement concernés », y compris au moyen d’un espace numérique de travail.

  • On peut donc utiliser un extrait d’une œuvre pour appuyer un propos ou étayer une argumentation dans le cadre d’un cours, de travaux d’élèves, ou encore de sessions de formation d’enseignants.
  • En ligne, en revanche, il est nécessaire de prévoir un accès restreint avec des destinataires identifiés, ce qui interdit donc de présenter l’extrait en accès libre sur Internet.

C’est dans le cadre de cette exception que le ministère de l’Éducation nationale a conclu des accords nationaux qui portent sur l’utilisation des œuvres cinématographiques, audiovisuelles, sonores, musicales et vidéo-musicales, ainsi que sur l’utilisation et la reproduction des livres, des publications périodiques et des œuvres des arts visuels, etc.

Les protocoles publiés au Bulletin officiel

Protocole d’accord du 22 juillet 2016(6) sur l’utilisation et la reproduction des livres, des œuvres musicales éditées, des publications périodiques et des œuvres des arts visuels à des fins d’illustration des activités d’enseignement et de recherche

Circulaire du 6 septembre 2023(7)présentant la mise en œuvre du contrat du 23 juin 2023 qui concerne la reproduction par reprographie d’œuvres protégées dans les établissements d’enseignement du premier degré public et privé sous contrat.

Circulaire du 30 septembre 2023(8) présentant la mise en œuvre du protocole d’accord du 3 mars 2023 concernant la reproduction par reprographie d’œuvres protégées dans les établissements d’enseignement du second degré public et privé sous contrat.

Accord(9) sur l’utilisation des œuvres cinématographiques et audiovisuelles à des fins d’illustration des activités d’enseignement et de recherche

Accord(10) sur l’interprétation vivante d’œuvres musicales, l’utilisation d’enregistrements sonores d’œuvres musicales et l’utilisation de vidéo-musiques à des fins d’illustration des activités d’enseignement et de recherche

Bon à savoir

La diffusion d’œuvres cinématographiques et audiovisuelles en classe(11) dans le cadre d’un enseignement ou d’une action éducative doit se faire dans le respect de la propriété intellectuelle. Achetée ou louée par un enseignant pour un usage privé, une œuvre audiovisuelle ne peut être projetée en classe dans son intégralité.

Le droit d’auteur de l’enseignant

« En vertu de l’article L111-1 alinéa 3 du Code de la propriété intellectuelle, l’agent public auteur d’une œuvre de l’esprit jouit du droit d’auteur, même si l’œuvre de l’esprit est créée dans le cadre de ses fonctions. »

Le cas des enseignants-auteurs, en tant qu’agents publics, a été réglé par la loi DADVSI du 1er août 2006. Le statut d’auteur est désormais reconnu à l’enseignant qui crée une œuvre de l’esprit, en dehors ou dans le cadre de ses fonctions. Le droit d’auteur de l’enseignant est toutefois aménagé.

Le droit d’auteur de l’enseignant reconnu par la loi DADVSI

En vertu de l’article L111-1 alinéa 3 du Code de la propriété intellectuelle(12) (CPI), l’agent public auteur d’une œuvre de l’esprit jouit du droit d’auteur, même si l’œuvre de l’esprit est créée dans le cadre de ses fonctions. Le statut d’agent public ne fait pas obstacle au droit d’auteur, encore faut-il que l’œuvre de l’esprit soit « protégeable » au sens des articles L112-1 et suivants(13) du CPI et de la jurisprudence. 

L’enseignant peut ainsi revendiquer son droit d’auteur sur les œuvres originales de type « allocutions, sermons », « illustrations », « plans, croquis », etc. En pratique, il s’agit des cours et des supports pédagogiques créés et produits par l’enseignant, et qui revêtent le caractère d’originalité.
La condition d’originalité s’apprécie au cas par cas.

Le droit d’exploitation cédé à l’État pour l’accomplissement des missions de service public

Sur le plan des droits patrimoniaux, le droit d’auteur classique confère à l’auteur un droit d’exploitation sur son œuvre : les tiers qui souhaitent utiliser l’œuvre doivent obligatoirement obtenir l’autorisation préalable de l’auteur. Le droit d’exploitation de l’enseignant, pour sa part, est cédé de plein droit à l’État « dans la mesure strictement nécessaire à l’accomplissement d’une mission de service public(14)».

Lorsqu’un enseignant dispense un cours ou crée un support pédagogique qui est considéré comme une œuvre de l’esprit, l’Éducation nationale n’a pas besoin de conclure un contrat de cession de droits avec l’enseignant et ne lui verse pas de rémunération supplémentaire. 

Cela ne vaut que dans le cadre de l’enseignement, à des fins non commerciales. L’État, en effet, ne peut utiliser les œuvres de l’enseignant à des fins commerciales à moins d’obtenir préalablement son accord écrit.

Le droit d’exploitation commerciale de l’enseignant sur ses œuvres de l’esprit

Comme tout auteur, l’enseignant qui crée un cours ou un support pédagogique considéré comme une œuvre de l’esprit peut céder à des tiers le droit d’exploiter son œuvre, moyennant rémunération.

Exemples : un enseignant qui crée une carte géographique originale peut proposer à des éditeurs de leur céder des droits d’exploitation pour leur permettre de reproduire la carte dans des ouvrages. Un enseignant qui crée une méthode pédagogique originale peut vendre des droits d’exploitation à des organismes de formation.

Dans ce cas, l’État a un droit de préférence(15), c’est-à-dire que l’enseignant qui souhaite vendre ou donner un droit d’exploitation sur son œuvre originale doit en premier lieu le proposer à l’État, qui est prioritaire. 

Le droit moral de l’enseignant sur ses œuvres de l’esprit

Le droit moral de l’enseignant sur ses œuvres de l’esprit, créées dans le cadre de ses fonctions, est limitées à deux égards(16) :

  • L’enseignant ne peut pas s’opposer à la modification de son œuvre par sa hiérarchie.
  • Il ne peut pas exercer son droit de repentir et de retrait. Cela signifie qu’il ne peut retirer son cours ou son support pédagogique du circuit d’enseignement, sauf accord de l’établissement.

Le droit d’auteur des non-enseignants

« Le salarié qui crée une œuvre de l’esprit originale à l’occasion de son intervention peut revendiquer un droit d’auteur, peu importe que l’œuvre ait été créée dans le cadre de l’objet de son contrat de travail. »

Le droit d’auteur de l’enseignant est dérogatoire en raison de son statut d’agent public. Les intervenants qui ne sont pas enseignants bénéficient du droit d’auteur dans les conditions de droit commun : créer une œuvre de l’esprit qui revêt un caractère d’originalité.

L’intervenant non enseignant qui est lié à son employeur par un contrat de travail est un salarié. En vertu de l’article L111-1 alinéa 3 du CPI et d’une jurisprudence constante, « l’existence d’un contrat de travail conclu par l’auteur d’une œuvre de l’esprit n’emporte aucune dérogation à la jouissance de ses droits de propriété incorporelle(12)».

Le salarié qui crée une œuvre de l’esprit originale à l’occasion de son intervention peut revendiquer un droit d’auteur, peu importe que l’œuvre ait été créée dans le cadre de l’objet de son contrat de travail. Si son employeur souhaite exploiter l’œuvre, il doit obtenir l’autorisation préalable de l’intervenant, formalisée dans un contrat de cession de droits.

Le droit à l’image

« Parmi les supports pédagogiques diffusés, certains peuvent inclure des photographies, des captations vidéo ou des enregistrements sonores de personnes physiques. […] Leur accord ou celui de leurs responsables légaux est absolument indispensable. »

Parmi les supports pédagogiques diffusés, certains peuvent inclure des photographies, des captations vidéo ou des enregistrements sonores de personnes physiques. Qu’il s’agisse de personnels d’éducation ou d’élèves, obtenir leur accord ou celui de leurs responsables légaux, par écrit et pour chaque utilisation, est absolument indispensable.

Ainsi, L’ASL recommande de recueillir systématiquement l’accord de tous les acteurs impliqués, et en particulier des parents ou responsables légaux des enfants. Au-delà des conseils et d’un éventuel soutien juridique qu’elle peut fournir à ses adhérents, L’Autonome de Solidarité Laïque met à disposition sur son site de nombreux supports permettant de mieux appréhender les questions de droits à l’image : motions sur les risques numériques, site Juriécole avec les vidéos conseils des membres de son réseau d’avocats, etc.

 

Sources

  1. Loi n° 92-597 du 1er juillet 1992 relative au Code de la propriété intellectuelle
  2. Code de la propriété intellectuelle : article L112-1
  3. Loi n° 2006-961 du 1er août 2006, dite loi DADVSI, relative au droit d’auteur et aux droits voisins dans la société de l’information
  4. Code de la propriété intellectuelle : article L122-10
  5. Code de la propriété intellectuelle : article L122-5
  6. Protocole d’accord du 22 juillet 2016 (voir également le Bulletin officiel n° 35 du 29 septembre 2016)
  7. Circulaire du 6 septembre 2023
  8. Circulaire du 30 septembre 2023
  9. Accord sur l’utilisation des œuvres cinématographiques et audiovisuelles à des fins d’illustration des activités d’enseignement et de recherche
  10. Accord sur l’interprétation vivante d’œuvres musicales, l’utilisation d’enregistrements sonores d’œuvres musicales et l’utilisation de vidéos-musiques à des fins d’illustration des activités d’enseignement et de recherche
  11. Article « Comment utiliser des œuvres dans un cadre pédagogique ? » | Éduscol
  12. Code de la propriété intellectuelle : article L111-1 alinéa 3
  13. Code de la propriété intellectuelle : article L112-2
  14. Code de la propriété intellectuelle : article L131-3-1
  15. Code de la propriété intellectuelle : article L121-7-1
  16. Cour de Cassation, Chambre civile 1, 16 décembre 1992

Voir également : Cour de cassation, Chambre civile 1, 13 novembre 2008