Vous avez dit « hautement perturbateurs » ?

Comme le terme choisi l’indique, un élève « hautement perturbateur » est défini par son comportement. Les manifestations de celui-ci affectent et désorganisent le cours normal de la classe et de la vie scolaire, pouvant prendre des formes très diverses : déplacements sans autorisation, refus d’autorité, menaces, violences verbales, cris, dégradations, violences physiques envers les personnels ou les autres élèves, etc. Dans tous les cas, pour être qualifiés de « hautement perturbateurs », ces comportements doivent être répétés, constants, particulièrement graves et s’inscrire dans la durée.

S’il est difficile d’évaluer précisément l’ampleur du phénomène, le ministère de l’Éducation estime à 1 500 élèves (sur plus de 12 millions au total) le nombre de ces « poly-exclus »[1].

 

Le reflet d’un climat scolaire dégradé

En termes d’évolution, la plupart des personnels s’accordent à décrire un climat de plus en plus tendu face aux élèves et une souffrance accrue de la profession. Reflet de ce mal-être, le nombre de dossiers ouverts auprès de L’ASL était en hausse constante jusqu’en 2020 (année durant laquelle il a mécaniquement baissé du fait des confinements)[2]. Les insultes, menaces et propos diffamatoires constituent les deux tiers des dossiers tandis que les agressions physiques auprès des personnels restent – et heureusement – relativement rares.

Par ailleurs, face aux comportements perturbateurs et à leur violence, tous les établissements ne sont pas égaux. Ainsi, 40 % des établissements n’ont déclaré, sur les six premiers mois de l’année scolaire 2019-2020, aucun « incident grave » (violences physiques ou verbales, faits de harcèlement, intrusion d’armes, etc.)[3]. Mais, face à eux, 11 à 21 % des établissements parmi les plus défavorisés signalent dix ou plus de ces « incidents graves ». Les comportements les plus problématiques de la part des élèves tendent ainsi à se concentrer dans certaines zones urbaines défavorisées socialement.

 

Ce qu’apporte le plan de lutte contre les violences scolaires

Le dernier plan de lutte contre les violences scolaires de 2019 prévoyait deux nouveaux dispositifs pour prendre en charge spécifiquement les élèves hautement perturbateurs.

D’abord, l’intervention, à la demande de l’établissement, d’une équipe mobile mixte d’intervention scolaire. Composée de personnels éducatifs, sanitaires et médico-sociaux, l’équipe opère dans un cadre de collaboration renforcée entre les directions académiques et les agences régionales de santé (ARS), notamment en passant par les projets territoriaux de santé mentale (PTSM). Par ailleurs, l’Inspecteur d’académie est dorénavant fondé à inscrire l’élève dans une des classes relais prévues pour prendre en charge les élèves aux comportements perturbateurs.

En complément de ces dispositifs, des internats relais sont également prévus : ils doivent succéder aux internats tremplins pour accueillir les élèves en rupture profonde.

 

Aujourd’hui, une réponse collective en 3 niveaux

Dans tous les cas, ces nouvelles réponses ne doivent intervenir qu’en troisième niveau, c’est à dire, après que des solutions éducatives aient été mises en œuvre au sein des établissements. Ainsi, c’est en premier lieu à l’équipe éducative de l’établissement de se réunir pour gérer la situation grâce à une prise en charge collective. L’équipe éducative est la seule en capacité d’envisager la totalité des possibilités et d’estimer la pertinence des réponses possibles en interne, comme par exemple, les plans personnalisés de réussite éducative (PPRE).

Si le dialogue et les procédures disciplinaires (voire les recours judiciaires pour les cas les plus graves) effectués au niveau de l’établissement ne suffisent pas et que les comportements perturbateurs se poursuivent, le deuxième niveau d’action consiste à associer en complément, des actions éducatives engagées et des ressources extérieures. Il peut s’agir de professionnels de l’Éducation nationale tels les personnels médico-sociaux ou bien des personnels travaillant au sein de structures dédiées comme les ITEP et  les SESSAD. S’appuyant sur la diversité de leurs expertises et expériences, ces professionnels réunis peuvent à leur tour actionner de nouveaux leviers.

Quel que soit le niveau d’intervention, la relation avec la famille de l’élève est la clé. La famille doit être reçue, informée et associée autant que possible aux décisions. Parce que cette relation est complexe et que tous les personnels n’y sont pas formés, L’Autonome de Solidarité Laïque accompagne, écoute et conseille les personnels d’éducation. Son approche originale des situations intègre dans l’analyse des situations, l’expertise juridique et sa connaissance des réalités du monde de l’éducation. Elle oriente ses adhérents vers l’organisation d’une médiation lorsque celle-ci est nécessaire. Plus largement, L’ASL est là pour écouter les professionnels de l’éducation et les conseiller sur les comportements perturbateurs comme sur l’ensemble des violences auxquels ils peuvent faire face.

 

[1] Ministère de l’Education nationale, 2019

[2] Baromètre de L’ASL 2020

[3] Enquête Sivis (système d’information et de vigilance sur la sécurité scolaire) 2019-2020, DEPP (direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance)