Une dégradation du climat scolaire

Plusieurs indicateurs montrent une érosion continue, depuis plus de 10 ans, de la perception du climat scolaire par les personnels interrogés, même si celui-ci reste encore majoritairement positif. Nous passons en effet de 73,5 % de personnes tout à fait satisfaites ou plutôt satisfaites en 2011 à 64,2 % en 2016 et à 58,5 % en 2023. Très significative statistiquement, cette dégradation est en partie liée à la relation avec les parents d’élèves, puisqu’on passe de près de 15 % de personnels ne se sentant pas respectés par les parents à près de 19 % en 2016 et 27,5 % en 2023.

Un sentiment grandissant de mépris social et une méfiance très marquée envers la haute hiérarchie

Des réponses aux questions ouvertes comme aux questions fermées, on peut percevoir un sentiment de déclassement social, déjà présent dans les enquêtes précédentes, mais en augmentation, avec une forte rancœur contre la haute hiérarchie et les ministres en charge de l’Éducation nationale ces dernières années (rappel : le questionnaire a été mis en ligne en mars-avril 2023). 19,3 % des personnels des écoles primaires estiment ne pas être respectés par leur direction (c’est le cas de 38,1 % dans le second degré). L’échelon hiérarchique le plus proche, l’Inspecteur de l’Éducation nationale, est moins apprécié avec 37,1 % des personnels qui estiment ne pas être respectés par leur Inspecteur ou Inspectrice de circonscription. La haute hiérarchie de l’Éducation nationale est la plus mise en cause, et paraît la moins respectueuse des personnels de terrain. Les réponses à la question : « Vous sentez-vous respecté par la hiérarchie de l’Éducation nationale (hors IEN) ? » sont sans appel avec une moyenne de 74 % de réponses négatives, presque autant que dans le second degré (78 %).

Une mise en question forte de « l’école inclusive » comme principal problème d’après les personnels

C’est certainement le point le plus remarquable et le plus préoccupant de l’étude : les difficultés rencontrées par les personnels sur la mise en œuvre de « l’école inclusive ».

Ces difficultés et ce rejet des personnels sont fortement liés aux situations qu’ils rencontrent avec des élèves « présentant des troubles du comportement ». On passe d’un peu moins de 40 % en 2011 à 60 % en 2016 et désormais à 73,5 % en 2023 de répondants disant avoir connu des difficultés fréquentes ou très fréquentes avec des enfants « gravement perturbés ».

 « Les personnels se retrouvent seuls et désemparés et ne peuvent en aucun cas assumer les manques et carences des acteurs institutionnels, notamment ceux du secteur du médico-social et de la santé. Ce sujet doit absolument être traité, et nos travaux sont une véritable alerte destinée aux acteurs institutionnels afin qu’ils assument les responsabilités qui leur incombent. C’est un combat que L’ASL a décidé de prendre à bras-le-corps pour soutenir l’ensemble des personnels d’éducation », indique M. Vincent Bouba, président de L’Autonome de Solidarité Laïque.

Une formation à revoir

Sur la question de la formation, les résultats de l’enquête sont assez préoccupants. En effet, 68,5 % des répondants estiment avoir été pas du tout ou plutôt mal formés pour exercer leur métier.

Concernant les besoins de formation clairement exprimés par les professionnels eux-mêmes, ce sont avant tout les nécessités liées à la gestion des élèves à besoins éducatifs particuliers qui sont évoqués. Il faut le dire clairement de nouveau : ce ne sont pas ces élèves qui posent un problème en tant que tel, mais les conditions de leur accueil, un message qu’espère faire entendre très rapidement L’Autonome de Solidarité Laïque à M. Gabriel Attal, ministre de l’Éducation nationale.

 

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* Éric Debarbieux est professeur émérite en sciences de l’éducation à l’université Paris-Est Créteil et Vice-président de l’association Prévenance.

* Benjamin Moignard est professeur en sciences de l’éducation à l’université Cergy-Paris, Président de l’Observatoire universitaire international de l’éducation et de la prévention (OUIEP) et membre du laboratoire EMA.