Violences sur internet et les réseaux sociaux
Un usager (mineur) s’est connecté sur un réseau social via un ordinateur de mon institution. Je suis tombée par hasard sur son « profil » et ai découvert des photos où l’usager pose avec des armes à feu et des armes blanches. Ces photos sont toujours accessibles car enregistrées par l’historique du navigateur. J’en ai informé ma Direction qui n’a pas donné suite. Quelles sont mes possibilités d’action ? Quelles sont celles de ma Direction ?
Me Florence Lec : Vous avez parfaitement bien fait d’alerter votre direction. Ce qui est primordial c’est bien évidemment de l’avoir fait par écrit. Par ailleurs, je vous rappelle les dispositions de l’article 40 du code de procédure pénale qui prévoit que tout fonctionnaire qui, dans l’exercice de ses fonctions, acquiert la connaissance d’un crime ou d’un délit est tenu d’en donner avis sans délai au procureur de la République et de transmettre à ce magistrat « tous les renseignements, procès verbaux et actes qui sont relatifs ». Je vous encourage donc, dans la mesure où l’usager semble être mineur, à alerter les services du procureur de la République compétents.
Quelle est la responsabilité d’un enseignant lorsque l’un de ces élèves utilise (en classe, à la maison) la messagerie d’un ENT pour harceler un camarade ?
Me Florence Lec : La responsabilité de l’enseignant peut être engagée s’il n’a pas exercé notamment en classe son devoir de surveillance à l’égard de l’élève qui pourrait diffuser des messages de harcèlement à l’égard de ses camarades. Il convient, en conséquence, qu’il justifie qu’il met tout en œuvre pour faire cesser cette situation. S’agissant d’un harcèlement à l’égard d’un autre élève qui peut avoir des conséquences graves, un signalement apparaît indispensable auprès du chef d’établissement voire de la hiérarchie. Dès lors où ces précautions sont prises, votre responsabilité ne pourrait être engagée. Soyez cependant attentif à ne pas laisser perdurer une telle situation car en cas d’incident grave des parents d’élève pourraient vouloir vous mettre en cause pour non-assistance à personne en danger et l’administration pour défaut de signalement. L’équipe de L’ASL de votre département pourra vous conseiller au mieux dans cette situation.
Jean-Louis Linder : Ici encore, vous devez faire remonter par écrit l’ensemble des éléments dont vous avez connaissance.
Je reçois un courriel d’un parent d’élève qui m’accuse de choses notamment de ne pas écouter sa fille qui serait victime de harcèlement… Il y a des propos diffamatoires et beaucoup de mépris, à l’égard des autres enseignants et du personnel de cantine. L’équipe pédagogique s’est réunie et a décidé de recevoir cette dame avec un représentant de parent d’élève. J’avoue avoir pensé en premier lieu à porter plainte pour diffamation. Qu’en pensez-vous vous ?
Me Florence Lec : La démarche entreprise par l’équipe pédagogique qui souhaite recevoir le parent d’élève qui diffame accompagnée d’un représentant des parents d’élève apparaît tout à fait légitime. Une explication pourra s’en suivre et des excuses présentées à toute la communauté éducative. Si la situation ne s’améliore pas, vous avez toujours la possibilité de déposer une plainte pour diffamation qui repose en particulier sur le courriel que vous avez reçu mais également sur d’autres témoignages qui peuvent concerner d’autres collègues. Vous pouvez avoir recours à une plainte auprès du Procureur de la République ou une citation directe devant le tribunal judiciaire pour faire sanctionner le délit de diffamation publique à l’égard d’un fonctionnaire dépositaire de l’autorité publique ou un citoyen chargé d’une mission de service public, par parole, écrit, image ou moyen de communication au public, y compris par voie électronique. Une jurisprudence abondante existe dans ce domaine mais vous devez avoir recours impérativement au conseil et au suivi de l’avocat-conseil de votre Autonome après saisine du président délégué de votre département. J’attire cependant votre attention sur le fait que ce type de délit, concernant la diffamation, se prescrit par 3 mois, notamment à compter de la date où votre courriel a été reçu et rendu public.
Jean-Louis Linder : Avant de vous engager sur une action en justice, vous pouvez contacter votre délégation départementale de L’ASL qui vous conseillera au plus près de la situation. Un dépôt de plainte n’est pas anodin et l’avis expert de nos avocats-conseil est toujours recommandé. Les démarches conjointes rappelées par Me Lec entre une action éducative et juridique sont pertinentes.
Bonjour, Durant nos cours à distance, plusieurs collègues du collège ont eu à subir des intrusions d’élèves parfois inconnus qui les ont insultés dans le chat, se moquant de leur physique entre autres ce qui montrait qu’ils connaissaient les professeurs et les critiquaient méchamment dans la discussion: les collègues ont pu conserver la preuve des propos tenus (capture d’écran, etc) et même si les auteurs des insultes peuvent être éjectés du cours, le mal est souvent déjà fait, donc comment procéder et à qui en parler, pour que ces éléments perturbateurs puissent être démasqués, faire éventuellement l’objet d’une plainte ?
Me Florence Lec : Dans ce type d’agression, vos collègues ont été très réactifs, notamment avec la capture d’écran. Si des élèves de l’établissement sont identifiés, une procédure disciplinaire peut être évidemment engagée. Vous devez bien sûr établir un rapport au chef d’établissement qui jugera des suites à conduire (convocation des parents, procédure disciplinaire, …). S’il s’agit d’éléments extérieurs, vous avez la capacité de déposer une plainte auprès des services de police tout en informant au préalable votre administration. Une telle démarche nécessite que vous soyez conseillée et accompagnée par les militants de la délégation départementale de l’ASL et de l’avocat-conseil de l’Autonome si nécessaire. Si les éléments perturbateurs n’ont pu être identifiés, les services de police saisis disposent de moyens d’investigation qui pourraient le permettre.
Lors du confinement, j’ai eu des élèves non identifiés qui sont entrés dans la classe virtuelle sur la plateforme du CNED. Ils ont fait le bordel et insultaient. Les chefs n’ont jamais donné suite malgré l’intervention des syndicats. Puis je demander réparation au rectorat sachant que la protection fonctionnelle n’a pas été mise en place ?
Me Florence Lec : Il n’est absolument pas acceptable que vous n’ayez aucune réponse de la part de votre hiérarchie notamment si vous avez fait un rapport d’incident. Je vous conseille de réitérer votre démarche par écrit auprès, le cas échéant, soit de l’académie, soit du rectorat. Par ailleurs, en de telles circonstances, et si vous êtes victime de ces débordements et insultes, il est normal que vous demandiez et obteniez la protection fonctionnelle. Je vous conseille, là encore, de vous rapprocher du recteur ou de la rectrice dans votre département. La délégation départementale de L’ASL saura vous conseiller.
Des parents d’élèves se plaignent des enseignants de l’école sur un groupe privé Facebook portant le nom de l’école. Nous ne voyons pas ce qui y est écrit. Les enseignantes sont citées et leur travail critiqué. Des captures d’écran m’ont été envoyées. Quel recours avons-nous ?
Me Florence Lec : Il convient d’alerter rapidement votre hiérarchie et de lui communiquer les dites captures d’écran. Selon les contenus, il faudra ou non agir devant les juridictions pénales, et il sera par ailleurs du ressort du chef d’établissement de faire supprimer ce compte portant le nom de l’école. Je vous conseille de prendre attache auprès de la délégation départementale de L’ASL et de ses militants qui pourront vous orienter vers leur avocat-conseil à même de vous guider et conseiller dans des démarches juridiques.
Quels sont les recours pour un enseignant qui est persuadé d’être la cible d’injures sur les réseaux sociaux sans toutefois en avoir la preuve? Peut-il porter plainte contre X ? La plainte peut elle aboutir à une enquête des services de police ?
Me Florence Lec : Le droit ne supporte pas les suppositions… En effet, il n’est pas suffisant que l’enseignant soit « persuadé », il faut qu’il puisse démontrer, à travers des preuves, qu’il est la cible d’injures. Des captures d’écran qui permettent de l’identifier et de démontrer qu’il est victime de propos insultants sont déjà un commencement de preuve. Même s’il ne connaît pas l’auteur, l’enseignant pourra toujours aller déposer une plainte, à charge aux services de police d’investiguer pour trouver l’auteur.
Jean-Louis Linder : Avant toute démarche juridique, prenez attache auprès de votre délégation départementale.
Je suis enseignante en mathématiques en collège. Je voudrais témoigner du climat délétère qui règne particulièrement depuis septembre 2020. Les réseaux sociaux : Sur Snapchat, un groupe d’élève dont je suis PP en 3eme, tient des propos dégradant envers ma personne et ma fonction d’enseignante. C’est une élève, en marge de ce groupe, qui m’a fait ces révélations dans une lettre qu’elle m’a adressée. Les noms de 7 de ces élèves sont donnés. « Il y en a d’autres », dit elle. Voici la teneur de ces propos : » prof de merde », « prof nulle », » ne sait pas faire son métier », « une conne », » n’a rien à faire dans un collège »… Les agressions verbales des parents et des élèves: Un élève de ce groupe m’a menacée : « Vous allez voir quand vous aurez à faire à ma mère!! » ; je me suis faite en effet agresser verbalement en réunion parents/prof (seule prof pour recevoir les parents car PP, malgré les conditions sanitaires en décembre 2020). Un autre parent aux propos violents, m’a également agressée ce soir là au motif que je n avais rien fait des programmes. Faux, bien sûr. Comment puis-je me défendre contre des propos malveillants, diffamants qui circulent sur mon compte sur les réseaux sociaux? J’ai mis au courant le syndicat. Il me conseille de déposer une plainte, mais je n’ai que la lettre de mon élève bienveillante? Pourriez-vous me venir en aide? Je souhaite saisir le CHSCT. Pourriez vous appuyer ma démarche, qui consiste à dénoncer ces dérives dramatiques qui m’ont anéantie ?
Me Florence Lec : Votre témoignage est saisissant. S’agissant des élèves et des groupes WhatsApp, il convient très rapidement d’en informer le chef d’établissement afin qu’il diligente une enquête et une procédure disciplinaire. Concernant les agressions des parents, il conviendra de se tourner vers l’ASL départementale et ses militants. Ils pourront solliciter l’expertise de leur avocat-conseil pour vous conseiller sur les démarches juridiques à entreprendre en fonction des propos tenus. Vous devez être soutenue dans cette épreuve. Je perçois une grande souffrance dans vos propos, vous évoquez un « anéantissement ». Je vous suggère d’aller consulter votre médecin qui, le cas échéant, pourra, en fonction de votre état de santé, vous prescrire un arrêt. En tout état de cause, nous sommes à vos côtés, courage !
Mon chef d’établissement m’a informé que des élèves du niveau de la classe de 5éme font circuler des messages insultants visant certains professeurs : insultes, mots grossiers, critiques du physique…sur leurs portables et réseaux sociaux J’ai été, à mon insu, la cible d’un petit message dont l’auteur est un élève d’une de mes classes de 5 éme qu’il a échangé avec d’autres élèves. voici le message : Logan j’ai dit sa pour rire elle a un cul sa sens le cercueil madame Thomas Hatice 68 Or c vrai Orgesa de koi On peut supposer qu’un autre message circulait comme l’indique le » pour rire » dans cette réponse. Que faire ? Comment réagir face à cet élève ? Quelle attitude puis-je avoir face aux élèves qui ont eu connaissance de ce message et qui on une attitude fausse vis à vis de moi, leur professeur ? Convoquer le ou les responsables légaux ? Porter plainte ? Ce genre d’incivilité devient quotidienne et pose le problème de la censure parental face à l’utilisation des réseaux sociaux, le problème du discrédit porté par certains élèves sans éducation sur le corps enseignant qui viennent pour « s’amuser » et n’ont pas de niveau scolaire.
Me Florence Lec : Face à ce type de propos et dans la mesure où l’auteur est identifiable, une procédure disciplinaire pourra être intentée. Par ailleurs, puisque d’autres élèves, ont semble-t-il été complices de ces propos et n’ont rien dit/ou rien fait, il conviendrait également qu’une réunion puisse être fixée entre le chef d’établissement et les parents d’élèves pour alerter et mettre en garde contre ces propos diffamatoires et outrageants sur internet. Un dépôt de plainte pourrait être envisagé si l’issue de la procédure disciplinaire ne vous donnait pas satisfaction. Nous vous invitons à vous rapprocher de votre délégation départementale qui pourra vous conseiller au mieux. Sachez également que des associations, organisations complémentaires de l’école interviennent dans les établissements scolaires afin de dispenser de séances d’éducation aux pratiques numériques. Cela peut faire l’objet d’un projet au sein de l’établissement pouvant favoriser une utilisation pertinente des réseaux sociaux.
Jean-Louis Linder : Ce comportement est en lien direct avec le règlement intérieur et ce qui ne saurait être acceptable en présentiel ne l’est pas moins en distanciel. Un fiche incident est indispensable avec tous les éléments que vous évoquez. Les incivilités se sont amplifiées par l’usage de relations « hors la classe » et les parents sont les premiers responsables qu’il convient de remobiliser en équipe. Chaque professeur gère sa classe au mieux mais lorsque les règles sont transgressées cela relève bien du collectif et du règlement intérieur.