Pourriez-vous nous présenter votre parcours ?

J’ai exercé mon métier d’infirmière dans différentes sphères : urgences, bloc opératoire, cancérologie, chirurgie, infirmière libérale, avant de faire le choix en 2006 de passer le concours d’infirmière scolaire, car je souhaitais développer la partie prévention du métier.

Aujourd’hui, je travaille en poste mixte, c’est-à-dire que j’exerce dans le centre-ville de Toulon dans un collège (REP) de 600 élèves et dans les huit écoles primaires et maternelles qui lui sont rattachées, et qui rassemblent également 600 élèves.

Quelles sont vos missions au quotidien ?

Elles sont de plusieurs ordres et se déclinent différemment dans les niveaux du premier et second degrés.

Le premier volet concerne le suivi individualisé des élèves et tout ce qui touche à la vie de l’élève : accueil, accompagnement psychologique et relationnel lié à la santé et la scolarité des élèves, dépistage infirmier et suivi des élèves selon les besoins, que ce soit dans le cadre de signalements, dans le cadre d’élèves en situation de handicap (reconnus à la MDPH) ou pour ceux pour lesquels il y a un projet d’accueil individualisé (PAI).

À côté de cela, il y a des missions dites « particulières », liées à la protection de l’enfance que l’on partage avec les médecins scolaires, les assistantes sociales et les psychologues scolaires sur les publics victimes d’abus sexuels, de maltraitance ou de négligence de soins.

Le second volet est lié à la prévention et l’éducation à la santé : risques auditifs, risques addictifs (tabac, drogue, etc.), harcèlement, sommeil, nutrition ou encore la santé environnementale et participative. Cependant, la manière d’exposer les sujets et de faire de la prévention sera différente selon que l’on s’adresse aux élèves du premier ou du second degré. Au collège, je parle de l’éducation à la relation amoureuse et à la sexualité alors qu’en primaire j’aborde plutôt la puberté et les changements du corps.

De quelle manière sont dispensés ces enseignements ?

Je dispense nombre de ces enseignements en mettant en place des ateliers, des expositions participatives ou autres activités (mise en place d’un compost ou d’un jardin dans l’école, escape games, etc.). Cela est beaucoup plus marquant pour les élèves qui s’impliquent pleinement.

Malheureusement, les restrictions et mesures sanitaires liées à la Covid-19 rendent ces activités bien plus compliquées aujourd’hui.

Avec qui travaillez-vous sur ces différentes activités ?

Je peux monter ces ateliers seule ou avec d’autres enseignants selon la motivation et les sujets, et plus particulièrement avec l’enseignant documentaliste. Il peut également y avoir un lien avec d’autres acteurs de l’école qui possèdent de nombreuses ressources ou outils qu’il m’est possible de solliciter comme le comité départemental d’éducation pour la santé (Codes), la MAE, le Mouvement français pour le planning familial (MFPF), l’Union française de santé bucco-dentaire (UFSBD), etc. Tous les acteurs avec qui je travaille doivent être agréés par l’Éducation nationale.

Exercez-vous d’autres missions que celles déjà décrites ?

Oui, le métier intègre par exemple une mission de surveillance épidémiologique qui est, au vu du contexte, très importante aujourd’hui.

Je gère également l’organisation des soins et des urgences, mais également les événements traumatiques : attentats, violences, suicides, risques climatiques, etc. en m’occupant des différents publics impactés dans le cadre de la cellule de crise mise en place.

D’autres missions peuvent être attribuées à l’infirmière scolaire mais cela nécessite une formation particulière. C’est le cas pour le brevet de secourisme.

Quels sont les parcours de formation qui vous sont dédiés ?

Pour le métier d’infirmière scolaire, il n’y a pas de formation initiale, la prise de poste se fait directement après le passage du concours.

Sur la formation continue, il y a des choses importantes, mais également des manquements. L’Éducation nationale propose une très bonne formation sur l’éducation à la sexualité, mais pour les autres sujets, cela dépend de la politique académique. Par exemple, à Nice, depuis les attentats, une formation pour gérer les événements traumatiques a été mise en place.

Pourtant, il est nécessaire d’être mieux armé pour certaines de nos missions, et notamment en ce qui concerne le dialogue et le débat avec les élèves. Face à la violence de certains propos, il faut savoir gérer le débat afin de ne pas stigmatiser, mais également de répondre aux interrogations pour qu’elles ne se transforment pas en peur.

Quels sont les risques du métier auxquels vous êtes confrontée ?

D’abord, il y a parfois un sentiment de grande solitude face au nombre important d’élèves à gérer et, dans mon cas, encore plus depuis le départ à la retraite du médecin scolaire au mois de juin, qui à ce jour n’a pas été remplacé.

Comme tout personnel d’éducation, je suis également confrontée aux mêmes risques d’agression, que ce soit par des élèves ou par des parents.

Il y a ensuite les risques inhérents à mon métier de soignant, notamment les risques épidémiologiques et sanitaires. Bien sûr, ce sont des risques acceptés de par le choix même de mon métier. Pourtant, le problème qui se pose, d’autant plus depuis la pandémie, c’est le manque de moyens mis à disposition pour gérer la situation dans des conditions minimales de précaution : pas de vaccin pour la grippe saisonnière, pas de surblouses ou masques supplémentaires, pas de zone de protection avec la crise de la Covid-19.

Cela crée des conditions de travail stressantes, autant au niveau personnel que du point de vue de la santé publique.